Voies d’eau est un chantier en cours : c’est un ensemble de textes parus dans diverses revues. Il s’agit d’un projet de livre qui n’a pas abouti car il ne tenait pas en tant que livre, mais il était composé de plusieurs séries de textes nettement distinctes qui, me semblait-il, se tenaient en tant que séries autonomes. Je les publie ci-dessous, au fur et à mesure de leur parution en revue ; voici une liste de liens vers les sites des diverses revues qui ont accueilli Voies d’eau :
il longe le fleuve le long de la rive s’ef fraye d’un chemin inconnu jusque là (il fait un pas de côté, un autre pas de côté, se rend compte qu’il est revenu à la position initiale, refait un pas de côté) remplit son corps en cette terre qui ne plie pliera pas jamais sous son poids outre le centimètre de boue qui dégorgeant le ralentit (il ne sait pas où il va) s’en racine sans source ni peur il suture ses pas un à un re tombe au bord se re- tourne revient d’où qui ne fuit personne poursuit marche jusqu’à plus soif et c’est bientôt que tombe la dernière goutte il en terre de sa rage les cris s’ef face à lui- même sa peine à porter trop lourde (ne rien dire, ne pas parler : silence dans tout cela et sur toute chose) il poursuit son penchant de la terre ex- prime l’urgence dans ses pas vite dé- passe toute mesure (qu’est-ce qui pourrait l’arrêter) il effleure du bout du pied un brin d’herbe qui flotte es- suie le revers de la terre sur sa main il s’écueille sur la rive s’emmêle et prend terre et le voici au bout du fleuve, toujours il cherche cela qui le fait, pour une certitude se serait arraché un œil et pour jouer aurait fermé l’autre, en tête sa fuite et dans son sac ses désirs qu’il n’ouvrira peut-être jamais, des certitudes à sacrifier il n’en a plus il se laisse porter par le bruit du courant
outre l’air j’ai construit les murs de ma voix derrière le pays désitué je cherche mon endroit un bruit blanc où m’envelopper à peine le quadrillage de mes os poreux malléable perméable je n’ai qu’un ciel beige où attendre la catastrophe où à toi je repense qui en mes nouages me touches m’accèdes m’accélères ce soir peut-être le monde tournera-t-il encore une fois
) il s’arrête et ramasse une orange : y enfonce les doigts les ongles, la serre si fort qu’il la transperce, sur sa main son bras le jus coule, arrive au creux du coude : il l’étale jusqu’à l’épaule et sur le torse, sur ses jambes il fait jaunâtre sa peau et de plus belle, écrase le fruit contre son corps : une pulpe –
au soir se rince dans le fleuve (
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) il s’y enveloppe, y flotte : frais d’eau il baigne et son écorce de peau s’amollit : une pellicule orangée se décolle avec la forme d’un corps qu’à la nage il suit, comme son ombre portée par le courant il suit –
sous la pénombre s’endort (
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) au matin flotte dans le ciel rableui une odeur d’agrume (
Les deux textes de Terre à ciel ont paru dans la rubrique « Un ange à notre table ». Ils y sont accompagnés d’un entretien avec Clara Regy où je réponds à des questions sur ma pratique littéraire. Merci à elle ainsi qu’à Cécile Guivarch.
Le texte de Sitaudis a paru dans la rubrique « Apparitions ». Merci à Pierre Le Pillouër.